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35 ans après la chute de Saïgon
L’optimisme capitaliste au Vietnam
vendredi 30 avril 2010
Malgré le fait de vivre dans un pays officiellement socialiste, 56% des Vietnamiens sont en faveur de l’initiative privée et 67% considèrent acceptables les grandes différences dans les revenus.
C’était il y a 35 ans. Au début du mois d’avril, la région de Saïgon, capitale de la République du Viêt Nam (sud), était encerclée par les troupes de la République démocratique du Viêt Nam (nord). Après une quinzaine de jours de combat acharné, le président sud-vietnamien Thiệu démissionna le 21 avril et fut remplacé par le vice-président Trần Văn Hương, lui-même remplacé par Dương Văn Minh le 28 avril, surnommé « Le Président de 3 jours ». Après que les communistes eurent refusé toutes négociations, Dương Văn Minh ordonna la reddition le 30 avril, tandis que des hélicoptères américains surchargés évacuaient la ville et que les premiers boat people faisaient leur apparition.
Les célèbres images de ces centaines de Sud-vietnamiens tentant de fuir désespérément le Vietnam après la chute de Saïgon (aujourd’hui Hô-Chi-Minh-Ville) cadrent mal avec l’optimisme dans le futur que manifestent aujourd’hui les Vietnamiens et leur confiance dans le libre marché – celui-là même que combattaient les troupes communistes victorieuses.
Une enquête réalisée par Associated Press-GfK capte bien la rapidité avec laquelle la vie a changé au Vietnam après que le régime communiste décida, il y a maintenant 20 ans, d’appliquer des réformes libérales en faveur du libre marché, faisant ainsi sortir de la misère une bonne partie des 86 millions d’habitants. Selon le sondage, 85% des Vietnamiens considèrent que l’économie est plus prospère qu’il y a cinq ans, et 87% s’attendent à ce qu’elle le soit davantage dans cinq ans. 81% estiment que le pays va dans la bonne direction.
Après la fin de la guerre, en 1975, la dictature communiste appliqua, selon le manuel, une économie centralisée. Toutefois, face aux résultats calamiteux découlant immanquablement de toute économie socialiste, et à l’instar de la libéralisation économique entamée en Chine à la fin des années ’70, le régime décida de changer de fusil d’épaule et lança en 1986 le Đổi mới (renouveau), une réforme économique autorisant puis encourageant le libre marché. Cette libéralisation est cependant officiellement considérée comme une étape destinée à instaurer à terme le communisme et la doctrine marxiste n’a donc pas été abandonnée. Donc, contrairement à la pérestroïka soviétique, cette réforme n’a pas été suivie d’une libéralisation politique. Cependant, depuis cette date, le pays a été un cas exemplaire du boom du Sud-est asiatique : durant la dernière décennie, la croissance annuelle a été supérieure à 7% ; le taux de pauvreté est passé de 58% en 1993 à 11% cette année ; et le revenu par habitant est passé de 400$ à 1.000$ actuellement.
Il n’est donc pas surprenant de voir – malgré le fait de vivre dans un pays officiellement socialiste –
que 56% des Vietnamiens soient en faveur de l’initiative privée, contre seulement 25% qui préféreraient une plus grande intervention de l’État dans les entreprises. Et – peut-être un trait de caractère attribuable à la culture asiatique – plus étonnant encore : une majorité de Vietnamiens (67%) considèrent acceptables les grandes différences dans les revenus car c’est là un incitant pour les gens à travailler plus dur.