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Faut-il s’occuper des problèmes d’intérêt général ?

mardi 13 novembre 2007

En effet la résolution des problèmes d’intérêt général implique d’énormes coûts (comme tous veulent s’en mêler les procédures sont fastidieuses ; ces problèmes demandent un investissement en connaissances techniques assez important) alors qu’elle n’apporte que de faibles bénéfices (car ils sont dilués au sein de la société). Cette activité est donc déficitaire : tenter de résoudre les problèmes d’intérêt général est irrationnel. La logique économique, qui est celle des ultralibéraux, amène donc à une conclusion qui nous éloigne de l’action politique. Ceci expliquerait d’ailleurs l’apolitisme des récentes décennies où s’est imposé l’ultralibéralisme.

Il reste cependant un problème majeur : qui s’occupera de ces problèmes collectifs ? Les ultralibéraux auraient tendance à rejeter la voie technocratique (trop étatique) en s’appuyant sur leur vision d’une société autorégulée. On peut ici prendre un peu de recul et constater qu’il n’existe pas encore de société entièrement autorégulée (sauf, peut-être, la société internationale qui n’est dominée par aucune instance suprême). De plus, si tous se désintéressent des problèmes collectifs, il peut devenir intéressant pour un petit nombre de se les accaparer et tenter d’en tirer des avantages considérables. La démocratie pourrait alors trouver une justification dans le contrôle par la masse qu’elle procure et qui permet d’éviter ces d’abus.

Mais revenons au niveau individuel : nous avons vu que l’engagement politique (la tentative pour résoudre les problèmes d’intérêt général) était une activité à perte, comment se fait-il que bon nombre s’y consacrent encore ? Si on laisse de côté le cas du politicien, qui investit énormément dans l’entreprise politique au point d’en faire son métier et d’en vivre, comment expliquer les autres engagements, déficitaires ?

Il faut ici noter que les problèmes d’intérêt général, au-delà du fait que ce sont des problèmes collectifs réels, ont une fonction latente qui est de rassurer l’individu. En effet, la vision ultralibérale de la société est pour le moins inconfortable : il s’agit d’un ensemble gigantesque et disloqué (seul l’intérêt économique réunit des individus qui ne partagent aucune valeur commune), sur lequel les individus n’ont que très peu d’emprise (puisqu’elle obéit à un "ordre spontané"). Le fait de discuter ensemble des problèmes dits d’intérêt général permet au contraire de donner une double illusion d’unité de la société et de possibilité pour l’individu de la transformer.

La désutilité de l’engagement politique sur un plan matériel est ainsi compensée par le gain en confort intellectuel. A cela il faut ajouter que, dans une société où l’idéologie démocratique reste prégnante, l’engagement politique est récompensé par une rétroaction sociale positive (encouragements, sourires,…), bientôt intériorisée et complétée par une rétroaction morale positive (bonne conscience).

Ce raisonnement économique en termes de coûts-avantages, caractéristique des ultralibéraux, conduit à un doute sur l’intérêt de résoudre les problèmes d’intérêt général. En le développant un peu plus on débouche sur une remise en quetion de la pertinence de ces mêmes problèmes d’intérêt général : puisqu’ils ont pour fonction latente de donner l’illusion d’une société unifiée et soumise à la volonté des hommes, alors il importe peu que ce soient des problèmes bien réels. L’essentiel est qu’ils soient débattus et résolus tous ensemble. Ainsi l’Etat peut se permettre "d’inventer" des problèmes d’intérêt public au lieu de se concentrer à résoudre les problèmes d’intérêt commun.

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