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Saddam Hussein et Tocqueville

Les pays arabo-musulmans ont toujours évolué de manière violente. Ce qui présage mal de leur propension à accepter la démocratie.

samedi 15 février 2003

Prenons l’Irak. Nabuchodonosor, qui ravagea Jérusalem et emmena le peuple juif en exil à Babylone (587 avant J.-C.), ferait passer les Grecs de la même époque pour de doux humanistes. Sur les quatre-vingt-douze califes abbassides (750-1258 après J.-C.), plus de quatre-vingts moururent assassinés dans de sanglantes querelles de successions ou d’intrigues de palais. L’excellent Haroun al-Rachid, symbole d’un âge d’or où Bagdad régnait sur l’Empire arabe, était volontiers suspicieux et faisait valser les têtes avec un détachement désinvolte. La période turque n’est pas non plus caractérisée par un attachement forcené aux principes de l’habeas corpus.

L’Irak moderne n’est pas en reste. Le 14 juillet 1958, alors que la radio nationale diffuse « La Marseillaise » et « La Carmagnole », la famille royale est massacrée par les « officiers libres » du général Abdel Salem Aref, qui se réclament de Nasser. Le Premier ministre, Nouri as-Saïd, considéré comme une marionnette des Anglais, est tué, puis son cadavre est déterré et traîné à l’arrière d’une moto. Dans les années qui suivent, putschs et contre-putschs se succèdent jusqu’à l’avènement du Baas et de Saddam Hussein, qui enserre le pays dans un carcan de fer.

Prenons la Syrie. Sans remonter aux califes omeyyades (661-750 après J.-C.), les moeurs politiques contemporaines en vigueur à Damas ne puisent pas leur inspiration dans les rapports d’Amnesty international. A partir de la fin du mandat français, après la Seconde Guerre mondiale, les coups d’Etat s’enchaînent à un rythme quasi saisonnier. Jusqu’à l’arrivée au pouvoir de Hafez el-Assad, en 1970. En février 1982, une révolte des Frères musulmans est noyée dans le sang à Hama. La ville est méticuleusement pilonnée par les canons des Brigades de défense de Rifaat el-Assad, le frère du président. Bilan : 20 000 morts.

Prenons l’Iran. La Savak (services secrets) du chah - longtemps choyée par Washington - n’était pas véritablement une oeuvre de bienfaisance. Quant aux séides de Khomeyni, ils ont remis au goût du jour de rafraîchissantes coutumes tombées en désuétude : lapidations, amputations, pendaisons publiques, etc.

Prenons l’Arabie saoudite, naguère encore cajolée par les Américains, aujourd’hui vouée aux gémonies. C’est à la sortie de la grande prière du vendredi que les têtes des criminels ou des « déviants » tombent dans la poussière.

L’Egypte, la Jordanie ou les pays du Maghreb affichent des moeurs moins brutales, à l’exception de l’Algérie, ravagée par la guerre civile. Mais la démocratie y est des plus relatives. Partout, même dans le paisible Maroc, l’islamisme bouillonne. Le monde arabo-musulman oscille entre despotisme obscur et despotisme plus ou moins éclairé. Passer de Saddam Hussein à Tocqueville risque de prendre un certain temps

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