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Sept bonnes raisons de sortir des 35 heures

vendredi 18 avril 2003

La croissance. Avec les 35 heures, la France, depuis 1998, affiche la durée hebdomadaire (37 heures) et annuelle (1 460 heures) de travail la plus faible des pays développés. Le volume des heures travaillées diminue de 2 % par an, en même temps que sévit une pénurie de travail qualifié. La faiblesse record du taux d’activité (58 % et 48 % pour le secteur privé) va de pair avec le caractère endémique d’un chômage structurel qui touche plus de 9 % de la population active depuis un quart de siècle.

Les revenus. Le paradoxe des 35 heures consiste à avoir entraîné une augmentation du coût horaire du travail de 11,4 %, tout en se traduisant par un blocage des revenus, notamment pour les salariés les plus modestes. La logique malthusienne des 35 heures signifie inéluctablement une baisse du niveau de vie, consécutive à la réduction de l’activité. Sans travail, pas de progression de l’activité et du niveau de vie : ainsi s’explique que la croissance française soit revenue de 3,2 % à 1,3 % par an.

L’emploi. La montée en puissance des 35 heures n’a empêché ni la remontée du chômage, qui dépassera 10 % à la fin 2003, ni la destruction de plus de 120 000 emplois dans le secteur marchand. Bien plus, la dégradation de la trésorerie des entreprises françaises épouse exactement la mise en place de la réduction du temps de travail, qui a donc une responsabilité directe dans le nombre record des faillites (33 000 pour les huit premiers mois de 2003).

Les finances publiques. L’implosion des finances publiques françaises (déficit et dettes publics atteignant 4,1 % et 62 % du PIB) ne saurait être imputée aux seules 35 heures. Le coût budgétaire direct reste élevé : 9,5 milliards d’euros. Surtout, les coûts cachés des 35 heures sont considérables, avec la désorganisation de pans entiers des services publics, hôpital en tête.

Les inégalités. Les 35 heures ont accru les inégalités entre les statuts et accentué les clivages entre les catégories de la population active. Inégalité entre secteur public (9 à 16 semaines de congés payés en intégrant la RTT) et privé (6 semaines de congés payés). Inégalités entre grandes et petites entreprises, qui bénéficient d’un sursis jusqu’en 2006, les 35 heures s’appliquant dans 83 % des entreprises de plus de 200 salariés, 28 % de celles de 10 à 20, 19 % de celles de moins de 10 salariés. Inégalités suivant les secteurs d’activité enfin, avec la multiplication des statuts dérogatoires.

L’impact social. La concentration et l’intensification de la production se sont traduites par une dégradation des conditions de travail, provoquant une recrudescence des accidents du travail et des arrêts maladie (en progression de 5,6 %). Parallèlement, plusieurs études médicales montrent que le temps libre dégagé par les 35 heures a pu encourager la recrudescence de certains fléaux sociaux (alcoolisme, violences...).

La valeur travail. Le travail ne constitue pas seulement une source de revenus, mais aussi la meilleure des protections sociales, le moteur de l’intégration, le vecteur des identités, le pivot de la citoyenneté. Au-delà d’un crime de guerre économique, l’euthanasie du travail poursuivie par la loi des 35 heures est, avec la déliquescence du système éducatif, la première cause du blocage de la société et de l’exclusion de jeunes qui doivent attendre 32 ans en moyenne pour accéder à un emploi stable.

Quatre remarques pour conclure. Tout d’abord, les 35 heures sont exemplaires de ces réformes malthusiennes qui n’ont jamais été réclamées par les Français. La levée des 35 heures représente l’une des rares réformes qui puisse exercer des effets positifs rapides sur l’activité, l’emploi et les finances publiques. Elle relève du seul gouvernement, à l’exclusion de toute interférence de l’Union européenne, et constitue l’un des nombreux domaines où il reste totalement souverain. Les Français, sous le choc du déclin des années 30, de la débâcle et de l’Occupation, ont travaillé entre 48 et 58 heures de 1945 à 1960 pour reconstruire leur pays, en acceptant de remiser la loi des 40 heures. Ils doivent faire de même avec les 35 heures pour compter parmi les puissances économiques du XXIe siècle.

Emile Zola, le portraitiste impitoyable de la révolution industrielle et de ses misères sociales, concluait sa vie par ces mots : « J’ai vécu parce que j’ai travaillé, un équilibre s’est fait entre le monde et moi, je lui ai rendu en oeuvres ce qu’il m’apportait. » La France est aujourd’hui aussi brouillée avec le monde parce qu’elle est brouillée avec le travail.

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