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Conseil d’Etat : En politique, la précipitation est toujours mauvaise conseillère
vendredi 12 février 2010
Un bon législateur est un législateur qui légifère peu. Ce principe apparemment oublié par Nicolas Sarkozy et nombre de ses prédécesseurs amateurs d’inflation législative, vient d’être remis en lumière par une décision du conseil d’Etat ; ce dernier a condamné la façon dont a été prise la décision d’interdire la publicité à la télévision publique fin 2008.
Nicolas Sarkozy, toujours prompt à montrer son activisme en promettant à tous de répondre à leurs attentes immédiatement, avait fixé comme délai pour cette interdiction le 1er janvier 2009. Délai beaucoup trop court évidemment pour faire les choses de façon conforme aux lois existantes, mais les lois du marché politique l’emportent sur ces basses préoccupations. Par conséquent, le 15 décembre 2008, Christine Albanel, alors ministre de la culture, envoie alors une lettre à Patrick de Carolis, PDG de France Télévisions, lui enjoignant de supprimer les coupures publicitaires entre 22 heures et 6 heures du matin. Le 5 janvier, c’est chose faite et Nicolas Sarkozy peut se gargariser d’avoir atteint son but.
Seul hic, c’était une façon de faire parfaitement illégale selon le conseil d’Etat, qui note dans ses arrêts Nos 324233,324407 que c’est une violation de l’indépendance du groupe de télévision public et qu’une telle décision n’aurait pu être prise que par le Parlement, en vertu de l’article 34 de la Constitution : « La loi fixe les règles concernant : /- les droits civiques et les garanties fondamentales accordées aux citoyens pour l’exercice des libertés publiques ; la liberté, le pluralisme et l’indépendance des médias (…) »
Le communiqué enfonce le clou : « [Le conseil] a ensuite estimé que la suppression de la publicité pendant une part substantielle du temps d’antenne était une mesure qui avait pour effet de priver France Télévisions d’une part significative de ses recettes et d’affecter la garantie de ses ressources, qui constitue un élément de son indépendance. Or les règles concernant l’indépendance des médias relèvent, aux termes de l’article 34 de la Constitution, du pouvoir législatif. Une telle mesure ne pouvait donc être prise que par le législateur, comme l’a d’ailleurs jugé le Conseil constitutionnel dans sa décision n° 2009-577 DC du 3 mars 2009 sur la loi relative à la communication audiovisuelle et au nouveau service public de la télévision. »
Depuis, le parlement a pu être consulté et a voté une loi qui entérine la suppression de la publicité. Cette dernière, reste donc valable. Mais la précipitation et l’excès des lois a montré une fois de plus ses conséquences négatives.
Le même genre de précipitation prévaut aujourd’hui dans la réflexion sur la taxe carbone, dont l’inanité est pourtant largement reconnue. Les parlementaires UMP sauront-ils pour une fois entendre raison ?
Image : logo du conseil d’Etat, tous droits r