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Haïti : Tirer les leçons des catastrophes passées
lundi 22 février 2010
La presse internationale dénonce largement le déversement irresponsable d’argent public pour sauver Haïti et souligne l’efficacité du principe de subsidiarité pour aider du mieux possible les victimes du drame qui a secoué Haïti.
Ainsi, le président colombien de la Banque interaméricaine de développement (BID) d’écrire dans le quotidien bolivien El Tiempo :
« En 2001, le Salvador a connu deux tremblements de terre en l’espace d’un mois. Les séismes ont laissé quelque 200 000 familles sans toit. Ce que nous avons appris de cette expérience, c’est qu’il est beaucoup plus facile de gérer de petits camps de réfugiés que de vastes campements. Il est également recommandé d’embaucher des sinistrés pour effectuer, en échange de modestes salaires, des tâches comme le déblaiement des décombres. A Haïti, où la majeure partie de la population n’occupe pas d’emploi formel, il est essentiel d’adopter cette stratégie. Mon propre pays, la Colombie, est exposé à toutes sortes de catastrophes naturelles. En 1999, deux séismes ont détruit plus de 100 000 édifices et laissé un demi-million de personnes sans toit dans le Triangle du café, une région essentielle pour l’économie du pays. La Colombie n’avait jamais connu un désastre d’une telle ampleur. Pourtant, le processus de reconstruction a duré moins de quatre ans. Le secret de ce succès ? Le mécanisme adopté par le gouvernement colombien : au lieu d’utiliser les structures bureaucratiques existantes, le gouvernement a sélectionné des universités, des coopératives, des groupes civils et des associations professionnelles pour s’occuper de la reconstruction. Son rôle était limité à la supervision du processus et à l’attribution des ressources – des tâches pour lesquelles il employait à peine 120 fonctionnaires. Le pays a ainsi réussi à rebâtir quelque 130 000 logements endommagés et à construire de nouvelles maisons pour plus de 16 000 familles vivant dans des zones à risque élevé. »
Dans Le Nouvelliste (Haïti), le journaliste Cyprien L. Gary note pour sa part que « trop d’aide humanitaire peut étouffer l’économie ». L’agriculture n’a que très peu souffert du séisme et l’aide internationale mine complètement le secteur agricole :
« Ce qui pose problème est la hausse des prix des produits de première nécessité observée dans les villes de province tandis que dans les régions touchées par la catastrophe, ils s’affichent à la baisse. Ce phénomène s’explique par l’abondance et la distribution non planifiée de l’aide humanitaire dans les zones dévastées. Cette distribution désordonnée ne tient pas compte de la production locale alors que celle-ci est en augmentation constante depuis 2009 »
Il est cependant illusoire de croire qu’une planification étatique accrue permettrait de résoudre ces problèmes. Gary Mathieu, directeur de la Coordination nationale pour la sécurité alimentaire (CNSA), se trompe quand « il propose un mode de répartition de l’aide selon lequel les autorités haïtiennes devraient fixer avec les agences humanitaires un quota de riz déterminé et limité dans le temps ». Il faut laisser les initiatives privées se développer et l’aide publique au développement n’est que rarement une solution. Même les élites locales le disent, comme l’illustrent les témoignages de Dambisa Moyo (Zambie) ou de James Shikwati (Kenya). Citons ici une critique de L’Aide fatale par Guillaume Vuillemey :
« Ce n’est donc pas un hasard si, selon l’auteur, entre 1970 et 1998, c’est-à-dire durant la période au cours de laquelle l’aide au développement était au plus haut, la pauvreté a augmenté de 11% à 66%. Au fond, l’aide souffre d’un défaut essentiel : elle détruit les incitations à évoluer, à se réformer et à se développer. Pour autant, leur suppression n’aggraverait-elle pas la situation ? Au contraire, il s’agit d’une condition essentielle pour que l’Afrique trouve le chemin d’une croissance durable. »
Sur Contrepoints, on peut également lire une solution iconoclaste : Une solution médiévale pour secourir les Haïtiens
Image : Photographie de l’US Coast Guard, montrant un officier de l