Accueil > International > Europe > Les plans de sauvetage européens incapables de protéger l’emploi
Les plans de sauvetage européens incapables de protéger l’emploi
mercredi 24 février 2010
Les milliards d’euros dépensés par les différents gouvernements européens en plans de sauvetage des entreprises en difficultés n’ont pas permis de sauver des emplois. C’est le bilan que dresse le dernier rapport que la Commission Européenne avait commandé à Oxera, un cabinet de conseil indépendant. Le rapport complet est disponible en ligne en cliquant sur le lien suivant.
Apres deux années d’investigation, d’interviews et d’analyses quantitatives, Oxera va plus loin et conclut que le taux de survie des entreprises en difficultés serait moins élevé lorsqu’elles reçoivent une aide financière gouvernementale que lorsqu’elles n’obtiennent pas d’aide étatique.
Apres deux années d’investigation, d’interviews et d’analyses quantitatives, Oxera va plus loin et conclut que le taux de survie des entreprises en difficultés serait moins élevé lorsqu’elles reçoivent une aide financière gouvernementale que lorsqu’elles n’obtiennent pas d’aide étatique.
Cette conclusion va à l’encontre de la croyance bien ancrée au sein de la DG Concurrence selon laquelle l’aide gouvernementale à la reconversion des entreprises en difficultés servirait à sauver des emplois et des activités qui disparaîtraient autrement.
L’étude a disséqué plus de 1.300 entreprises en difficultés et souligne que les suppressions d’emplois sont plutôt liés à d’autres facteurs comme le taux de croissance antérieur de l’entreprise considérée, son taux d’endettement, et un environnement immédiat défavorable (zone économique en perte de vitesse, manque de perspectives et de possibilités de formation complémentaire pour les salariés nouvellement licenciés…).
Il est toujours utile de rappeler que, toutes choses égales par ailleurs, ces aides distribuées par les Etats - puisqu’elles sont des dépenses de l’Etat - sont obligées d’être financées par un accroissement des recettes de l’Etat. Celui-ci passe nécessairement soit par la hausse de la dette publique, soit par des hausses d’impôts, pénalisant ainsi les générations futures dans le premier cas, et les travailleurs des entreprises qui continuent de fonctionner tant bien que mal malgré la crise dans le second cas.
Les résultats de cette étude sont publiés à l’heure où l’Europe est confrontée à de grandes difficultés économiques et où la réponse des différents gouvernements du continent est bien souvent de tenter de traiter la dépression économique actuelle et l’incertitude future en venant financièrement en aide aux entreprises en difficultés.
Au sein des Etats-Membres de l’Union Européenne, les différents types d’aides et de subventions étatiques ont déjà connu un accroissement très important : de 66,5 milliards d’euros en 2007, elles ont bondi à plus de 280 milliards d’euros en 2008.
Ce rapport, commandé avant la crise financière, pourrait bien encourager la DG Concurrence de la Commission Européenne à examiner de manière plus critique les subventions d’états et autres plans de sauvetage que les gouvernements des Etats-Membres destinent à certaines de leurs entreprises afin de « sauver des emplois ».
Comme le souligne le directeur de Oxera, Luis Correia da Silva, la Commission pourrait s’inspirer de ce rapport afin de passer à une approche privilégiant « des interventions étatiques moins nombreuses et mieux ciblées ».
Une des conclusions les plus remarquables de l’étude est que 77% des entreprises en difficultés étudiées par Oxera dès 2007 et n’ayant reçu aucune aide gouvernementale existent encore en 2010 ou ont été rachetées depuis. Seules 23% de ces entreprises en difficultés ont fait faillite. Ce résultat est à rapprocher de celui auquel est arrivé une étude récemment publiée par le cabinet de conseil London Economics selon laquelle un tiers des 70 cas de plans de sauvetage gouvernementaux approuvés par la Commission entre 1995 et 2002 ont échoué.
Selon l’étude quantitative d’Oxera, les entreprises qui bénéficient des plans de sauvetage gouvernementaux sont moins susceptibles que les autres de poursuivre leurs activités, plus susceptibles de changer de statut juridique et plus susceptibles d’être rachetées par un concurrent.
La Commission n’a pas commenté la publication de ce rapport. Celui-ci avait été commandé afin de poser les bases d’une réforme de la méthodologie d’évaluation par la DG Concurrence des plans de sauvetage et de restructuration accordés par les gouvernements nationaux au cours de l’année 2009.
A cause de la crise économique et sans doute pour des raisons purement politiques, cette réforme est repoussée à l’année 2012. Une bien triste nouvelle quand on mesure à quel point elle pourrait éviter la mise en place de nouvelles subventions aux entreprises, mesures pénalisant les salariés et l’activité des entreprises dans un contexte économique et social pourtant fortement dégradé.
A lire sur Contrepoints :
Dossier sur la crise financière
Comment le gouvernement a créé la crise, John B. Taylor
Image : Drapeaux des pays europ