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Déjà 2.000 médecins

Les Cubains fuient l’île du docteur Castro... via le Venezuela

mardi 20 avril 2010

Que les Cubains cherchent à fuir la dictature socialiste n’est pas une nouvelle. La nouveauté vient de ce que, plutôt de le faire depuis l’île de Cuba, ils tentent leur chance par le Venezuela. C’est déjà le cas de 2.000 médecins cubains - ceux-là même dont est si fier le castrisme - , qui ont échappé au régime tandis qu’ils travaillaient au Venezuela.

Depuis 2003, le Venezuela accueille des milliers de médecins cubains pour, supposément, pratiquer dans les zones les plus défavorisées du pays et ainsi, selon la version officielle bolivarienne, payer l’énorme quantité de pétrole que Chávez « vend » et envoie à Cuba. Le régime vénézuélien fait état de 15.000 professionnels présents, bien que les déserteurs cubains parlent de 40.000.

Une des plus grandes justifications des thuriféraires de la dictature des frères Castro est celle qui fait référence au bon niveau des médecins cubains – même si le système sanitaire cubain a été complètement ruiné par 50 ans de socialisme – imputant ce savoir-faire aux bontés du régime. Rien de plus faux, évidemment : avant 1959, Cuba jouissait déjà du meilleur système de santé latino-américain et surpassait nombre de pays européens dans plusieurs indicateurs sanitaires. Ainsi, en 1957, le taux de mortalité infantile de 32 pour 1.000 naissances en vie était le plus bas d’Amérique latine et le 13e plus bas au mode selon les chiffres de l’ONU, devançant des pays comme la France, la Belgique, l’Allemagne de l’Ouest, Israël, le Japon, l’Autriche, l’Italie, l’Espagne ou le Portugal. En nombre de praticiens et de dentistes, en 1957, Cuba se situait au 3e rang en Amérique latine juste derrière l’Uruguay et l’Argentine et avec 128 médecins et dentistes pour 100.000 habitants se trouvait au même niveau que les Pays-Bas et devant la Grande-Bretagne (122 pour 100.000) ou la Finlande (96).

Mais depuis, la situation s’est inexorablement dégradée, comme le rapportait en 2005 la doctoresse Hilda Molina. Cette dernière est une personnalité du monde médical cubain de première importance. Spécialiste en neurochirurgie et en restauration neurologique, elle fut la créatrice du Centre International de Restauration Neurologique (CIREN). Elle a participé à de nombreux congrès scientifiques à travers le monde. Et elle fut députée du « parlement » cubain en 1993. En 1994, elle renonça à tout ce qui pouvait la rattacher à la dictature castriste. Surtout après que le CIREN devint un centre de soins exclusivement réservé aux étrangers payant en dollars. En 1995, elle rejoignit la dissidence cubaine interne. Donc, selon un rapport d’Hilda Molina publié par le CADAL et intitulé « Algunas consideraciones sobre el sistema de salud en Cuba », les principaux points sur la détérioration du système de santé cubain sont :

- Lamentable situation hygiénique. Distribution d’eau très déficiente. Eaux usagées et ordures disséminées dans les rues.
- Au moins deux générations de Cubains ont grandi avec d’importantes carences nutritionnelles.
- La gestion administrative de l’acquisition et la distribution des ressources médicales est inefficace et bureaucratique. Les employés volent les médicaments, les instruments, les aliments, etc.
- Détérioration alarmante des centres de soins (infrastructure en général, immeubles, équipement, ravitaillement). À cela s’ajoute des conditions hygiéniques et épidémiologiques si précaires que des contaminations sont présentes dans plusieurs institutions médicales.
- Un pourcentage élevé des services de santé sont de mauvaise qualité.
La corruption règne. Est né et se renforce un système de santé privé clandestin qui englobe médecins, infirmiers, techniciens, etc. On y paie en devises, en produits, en services, en influence.
- La discrimination est insultante. Aussi bien en ce qui concerne l’apartheid qui sépare les membres de la nomenklatura du peuple que celui qui sépare les Cubains des étrangers.
- L’habitude de fumer se répand aux enfants et aux adolescents. On note une augmentation des maladies contagieuses, carentielles, transmises par voie sexuelle, dérivées du stress, mentales, des suicides, de l’alcoolisme et de l’usage de stupéfiants.
- L’opinion du peuple cubain sur le système de santé cubain est majoritairement négatif.

Et maintenant, ce sont ces médecins – joyaux de la couronne de la dictature – qui fuient en masse l’île du docteur Castro. Mais ils ne le font pas depuis Cuba, chose pratiquement impossible dans cette prison à ciel ouvert, mais en profitant des voyages et des séjours à l’étranger imposés par le régime. Selon le journal colombien El Tiempo, ce sont près de 2.000 médecins cubains participant au programme chaviste « Barrio Adentro » qui, au terme d’un long et périlleux voyage, ont déjà quitté le Venezuela, depuis l’État occidental de Zulia, pour passer en Colombie, dans le département Norte de Santander, dont la capitale est Cúcuta, ou celui, plus au nord, de La Guajira.

El Tiempo rapporte le cas de ce médecin cubain qui rencontre un confrère à la station d’autobus de Maracaibo, capitale de l’État de Zulia, et qui se trouve être un compatriote qui désire également fuir Cuba et le Venezuela. L’un des deux pensa d’abord se trouver en face d’un agent des rédoutés services de la dictature castriste qui, au nombre de 60.000, entourent Chávez, surveillent et infiltrent les médecins troqués par les frères Castro. À la fin, ce furent 11 médecins qui se rencontrèrent ce jour-là pour fuir en direction de la Colombie voisine dans un voyage qui ne fut pas sans soucis, comme le raconte Marisol Gómez Giraldo, journaliste de El Tiempo. En effet, arrivés à la frontière, les membres du groupe furent interceptés par des gardes vénézuéliens qui, dans un premier temps, leur confisquèrent leur passeports, pour finalement les laisser partir après une heure contre une somme de 10 millions de bolivars (1.700 euros). Somme que les Cubains purent heureusement payer ensemble, au prix de leurs maigres économies, et poursuivre ainsi leur fuite vers la liberté, la plupart grâce à un visa pour les États-Unis obtenu via le Cuban Medical Professional Parole, un programme créé en 2006 par le Département d’État pour les médecins cubains envoyés dans des pays tiers.

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