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Quel délai sépare la France de la Grèce ?

lundi 3 mai 2010

Bon, ok, je sais, c’est mal, je fais une fixette sur la Grèce. Mais l’actualité me pousse dans mes derniers retranchements : Zahia n’apporte, quoi qu’on en dise, rien de neuf sous le soleil footeballistique, et le voile intégral m’indiffère. Quant aux pitreries syndicales françaises du 1er mai, elles n’intéressent plus guère que ceux qui vivent du syndicalisme comme certains ne vivent que par la vente de leur postérieur ou d’autres celle de leur langue de bois.

Il faut dire, aussi, qu’il est difficile de passer à côté d’un sujet qui qui concerne un demi-milliard d’individus dont le niveau de vie est, très probablement, amené à changer assez radicalement dans les prochaines années.

Et puisqu’on évoquait il y a quelques lignes les pitreries syndicales françaises, autant jeter un œil sur leur pendant grec : le manifestations se sont déroulées à Athènes et se sont bien sûr soldées par des incidents plus ou moins graves, ce qui était parfaitement prévisible.

En effet, on se souvient que mercredi dernier, la position officielle du gouvernement grec aux conditions posées par l’Allemagne pour fournir de l’aide se résumait fort simplement : « Niet ». Ou « Que dalle ». Ou « Des nèfles ». Les fiers Teutons, probablement pas trop heureux de devoir renflouer un pays qui avait notoirement dérapé depuis des années et avait filouté les chiffres officiels, ont en effet réclamé aux Grecs de faire une croix sur un certain nombre de dispositions comme celle instaurant un 13ème et un 14ème mois pour les fonctionnaires.

La suite des événements (notamment boursiers) avec la dégradation de la note de l’Espagne et le malaise général qui s’en est suivi a rapidement fait comprendre au gouvernement grec que ses latitudes de négociations se réduisaient à chaque seconde.

Mais, alors que les élites commencent à comprendre qu’il en va, réellement, de leur avenir (voire de leur tête) et qu’une remise en question profonde du mode de vie grec basé sur le crédit est absolument nécessaire, la partie la plus démonstrative du peuple se montre encore un peu rétive à l’idée qu’on va encore – passez moi l’expression – les fourrer délicatement avant de les rôtir dessus / dessous comme au restaurant.

Malheureusement, le principe de réalité ne permettra aucune contestation : il va falloir rembourser ou faire défaut. Dans un cas, c’est un serrage de ceinture sans précédent, dans l’autre … aussi ; en effet, la richesse ne se décrète pas, aussi doué soit-on dans la bidouille comptable. Elle ne s’acquiert qu’avec des efforts. Et le tort majeur des économies sociales-démocrates, baignées de démagogie, c’est d’avoir oublié de préciser à leurs sponsors – les joyeux citoyens, toujours prêts à être plus festifs – que les efforts qu’on ne fait pas maintenant seront à faire plus tard, intérêts inclus.

Et c’est donc avec une certaine consternation mêlée de résignation que je constate qu’en France, les leçons qu’on peut déjà tirer de la crise grecque ne sont absolument pas tirées.

Ainsi, alors que l’Allemagne évoque des sanctions et un renforcement des mécanismes de surveillance pour les mauvais élèves de la zone euro, la France, bille en tête, est déjà partie pour signer des deux mains l’aide aux cousins grecs, et, tant qu’à faire, emballer un montant autour de 120 milliards d’euros plutôt que les 40 prévus. On n’est jamais trop dépensier prudent. Surtout avec l’argent des Allemands autres.

On comprend le gouvernement allemand. On comprend aussi le gouvernement français.

Les Teutons ont beaucoup plus à perdre qu’à gagner avec l’aide à la Grèce. Avec la réunification, ils savent ce que peut vouloir dire « tenir un budget » et « faire des efforts ». Modération syndicale, salariale, sociale, qui se traduit notamment par une excellente compétitivité, une balance commerciale très positive et des comptes encore raisonnablement grevés par la crise. Aider la Grèce, c’est autoriser encore pas mal de coulage avec les règles imposées pour la stabilité de la zone. Autrement dit, c’est risquer de relancer le bastringue pour quelques mois, ou quelques années avec un peu de bol, et remettre le couvert aussi sec quand les problèmes reviendront, inévitablement.

Quant aux Français, il y a fort à parier que sous les dehors bonshommes d’un Woerth et d’une pétulante Lagarde se cachent en réalité des personnes parfaitement au courant de l’ampleur du désastre, et qui ont très bien compris que le plan d’austérité que l’Allemagne veut faire avaler à la Grèce sera exactement le même pour la France, quand son tour sera venu, en cinq fois plus gros …

Et la question du titre prend alors toute son importance : combien de temps sépare la France de la Grèce ?

A mon avis, au rythme des non-réformes, je ne donne pas deux années pleines à l’équipe gouvernementale (ou la suivante) pour en terminer une fois pour toute avec le triple-A français. Et, pourquoi pas, la Vème République…

D’ailleurs, les autruches du gouvernement, sentant confusément l’équarrisseur arriver avec son grand coutelas, courent dans tous les sens en cherchant un petit paquet de sable où planquer leur tête.

Dès lors, les remarques ridicules de la classe politique se multiplient pour, encore une fois, trouver des boucs-émissaires et faire détourner le regard de l’inaction gouvernementale.

Si ce n’est pas Merkel, ouvertement traitée de paysanne par le bolchevik en carton pâte aux yeux injecté d’un jaja qui lui sera monté au neurone une fois de trop, ce sont, bien évidemment, les agences de notations qu’on va montrer du doigt : Woerth se pose, pas suffisamment in peto d’ailleurs, la question de savoir si une bonne petite réforme de ces agences ne vaudra pas le coup.

Au passage, il montre qu’il n’a absolument rien compris au rôle de ces agences (fébrilement corsetées par des règles ultra-contraignantes fixées par les états au point qu’ils ont eux-même créé un oligopole indéboulonnable) qui, comme la girouette, indique, et avec pas mal de retard, le sens du vent.

Rouspéter contre la girouette en croyant lutter ainsi contre le bruit des volets qui claquent, c’est assez pitoyable et en parfaite adéquation avec le niveau moyen de nos « élites » en économie.

Le ministre est d’ailleurs rapidement suivi par l’Elysée qui n’en loupe pas une : l’incompétence des uns ne pouvant pas être mieux récompensée que par l’incompétence des autres, les clowns qui nous dirigent se filent de grandes claques amicales dans le dos en croyant pouvoir faire changer le sens du vent.

Pourtant, tous savent pertinemment que, quoi qu’ils fassent, une période d’austérité s’ouvre devant nous. Elle sera d’autant plus longue que les prêts, les aides, les agitations cosmétiques inutiles et les dépenses outrancières auront été soutenues.

A voir la taille des dépenses qu’ils veulent engager, on va en prendre pour loooooongtemps.


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