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De la taille de la calotte glaciaire groenlandaise et de ses changements

C’est grand comment ?

dimanche 23 mai 2010

Si on regarde la vraie mesure, on voit que le Groenland perd entre 0,005 et 0,008% de sa glace annuellement, et qu’à ce rythme là, comme on est le 23 mai 2010, la calotte glaciaire groenlandaise aura disparu entièrement quelque part entre l’an 14010 et l’an 21010... un 23 mai.

Ce sujet me tient particulièrement à cœur, donc j’espère qu’on me pardonnera si je m’étends un peu.

Il y a une technologie des plus merveilleuses qui s’appelle les satellites GRACE, ce qui signifie Gravity Recovery and Climate Experiment, soit récupération de la gravité et expérience sur le climat. Elle se compose de deux satellites qui volent en formation. En mesurant la distance entre les deux à un micron près (le centième de l’épaisseur d’un cheveu), on arrive à calculer le poids des choses sur la Terre de façon très précise.

Un des choses que GRACE nous permet de peser sont les pertes de la glace qui couvre le Groenland. Il y a un nouvel article scientifique à ce sujet intitulé Peser Le Groenland.

Bon, quel problème peut-il bien y avoir avec cet article ?

Eh bien, il commence par :

Scott Luthcke pèse le Groenland, tous les dix jours. Et l’île a perdu du poids, en moyenne 183 gigatonnes (200 kilomètres cubes) en glace, annuellement ces six dernières années. Ca représente un tiers du volume d’eau du Lac Erié, tous les ans. La diminution de la calotte glaciaire du Groenland offre une des preuves les plus puissantes du réchauffement climatique.

Ouh, ça fait peur, non ? Un tiers du volume du Lac Erié tous les ans. On ne peut pas laisser une telle chose se produire.

Mais qu’est-ce que ce volume, un tiers du Lac Erié, signifie exactement ? On pourrait dire que c’est 80 millions de piscines olympiques, ou 400 fois le volume du Port de Sydney, ou à peu près le même volume que les réserves de pétroles mondiales connues. Ou bien on pourrait dire que cette perte de glace représente 550 fois le poids de tous les humains de la planète, ou le poids de 31.000 Grandes Pyramides de Gizeh … mais ça ne nous rapproche toujours pas de la compréhension de ce que cette diminution représente.

Et pour comprendre ça, il y a une chose et une seule à laquelle nous devons comparer la perte glaciaire du Groenland, et cette chose c’est le volume de la calotte glaciaire Groenlandaise elle-même. Donc, combien de kilomètres cubes de glace reposent-ils sur le Groenland ?

Ma référence préférée pour ce genre de questions c’est le Physics Factbook, parce qu’au lieu de donner une réponse il donne une variété de réponses provenant de différents auteurs. Dans le cas présent, je suis allé à la page calotte glaciaire. Elle donne les réponses suivantes.

Spaulding & Markowitz, Heath Earth Science. Heath, 1994 : 195. dit moins de 5,1 millions de kilomètres cubes.

“Greenland.” World Book Encyclopedia. Chicago : World Book, 1999 : 325 dit 2,8 milions de kilometers cubes

Schultz, Gwen. Ice Age Lost. 1974. 232, 75 dit 2,6 millions de kilomètres cubes

Denmark/Greenland. Greenland Tourism. Le Conseil Danois au Tourisme dit moins de 5,5 millions de kilomètres cubes.

Lequel parmi ces quatre devrions-nous choisir ? Eh bien, les deux chiffres les plus élevés disent « moins que », donc ils sont des limites supérieures. Le Physics Factbook dit, « d’après ma recherche, j’ai trouvé différentes valeurs pour le volume de la calotte glaciaire polaire. … Pour le Groenland, c’est environ 3 millions de kilomètres cubes ». Bien sûr, il nous faut dire qu’il doit y avoir une marge d’erreur dans ce chiffre de l’ordre de 0,4 millions de kilomètres cube environ.

Et maintenant nous avons quelque chose à quoi comparer le tiers du volume du Lac Erié ou les 400 Ports de Sydney ou les 550 fois le poids de la population humaine. Et quand nous le faisons, nous trouvons que les 200 kilomètres cubes perdus annuellement sur un total de 3 millions de kilomètres cubes veulent dire que le Groenland perd 0,007% de son poids total chaque année. Sept millièmes de un pourcent annuellement, tout doux, mon petit cœur.

Si ce taux de diminution terrifiant se prolongeait sans discontinuer, bien sûr, tout aurait disparu en un petit 15.000 ans.

Ça c’est mon dada, de voir des chiffres ainsi présentés de la manière la plus effrayante possible. La perte de 200 kilomètres cubes de glace par an n’est pas « une des preuves les plus puissantes du réchauffement climatique », ça c’est de l’hyperbole. C’est un changement trivial dans un bloc de glace gigantesque.

Et qu’en est-il des erreurs dans les mesures ? Nous savons que la marge d’erreur dans la calotte glaciaire Groenlandaise est de l’ordre de 0,4 millions de kilomètres cubes. Et l’erreur dans les mesures effectuées par les satellites GRACE ? Cette référence indique qu’il y a une marge d’erreur de plus ou moins 10% dans l’estimation du Groenland par GRACE. Quel effet cela a-t-il sur nos chiffres ?

Eh bien, si nous prenons l’estimation basse du volume de la calotte glaciaire et l’estimation haute de perte, nous obtenons 220 kilomètres cubes de perte annuelle sur un total de 2.600.000 kilomètres cubes. C’est-à-dire une perte annuelle de 0,008% et un délai jusqu’à la disparition totale de 12.000 ans.

En allant à l’opposé, on obtient 180 kilomètres cubes de perte annuelle sur un total de 3.400.000 kilomètres cubes. C’est-à-dire une perte annuelle de 0,005% et un délai jusqu’à la disparition totale de 19.000 ans.

Il est toujours important d’inclure les marges d’erreur dans les calculs, pour voir si elles font une différence significative dans le résultat. Dans le cas présent il se trouve qu’elles ne font pas une grosse différence, mais chaque cas est différent.

C’est ça qui fait bouillir mon sang à gros bouillon, des chiffres sans signification et sans marge d’erreur présentés pour créer un effet de choc maximum. Si on regarde la vraie mesure, on voit que le Groenland perd entre 0,005 et 0,008% de sa glace annuellement, et qu’à ce rythme là, comme on est le 23 mai 2010, la calotte glaciaire Groenlandaise aura disparu entièrement quelque part entre l’an 14010 et l’an 21010 … un 23 mai …

Donc, la prochaine fois que vous lisez quelque chose qui dit, à bout de souffle,

« Si cette activité au Nord-Ouest du Groenland continue et accélère réellement certains des glaciers majeurs de la zone comme le Glacier Humboldt et le Glacier Peterman, la perte de glace totale du Groenland pourrait augmenter de 50 à 100 kilomètres cubes de glace supplémentaires d’ici quelques années »

vous pourrez dire « eh bien si elle augmente de l’estimation la plus haute, et c’est un gros « si » puisque les scientifiques ne font que deviner, ça augmenterait la diminution de 0,007% par an à environ 0,01%, ce qui voudrait dire que la calotte glaciaire Groenlandaise ne durerait que jusqu’au 23 mai 10010. »

Et au bout du compte, l’article qui m’a fait bouillir le sang se conclut sur ces lignes :

« La bonne nouvelle pour Luthcke est qu’une autre équipe utilisant une méthode entièrement différente a séparément obtenu des mesures de la fonte de la glace Groenlandaise qui, dit il, sont presque identiques à ses données GRACE. La mauvaise nouvelle, bien sûr, c’est que ces deux ensembles de mesures rendent encore plus certain que la glace Groenlandaise fond plus vite que quiconque ne s’y attendait. »

De grâce, épargnez moi. Comme l’article le met en avant, ça ne fait que six ans que nous mesurons la glace Groenlandaise avec les satellites GRACE. Comment quiconque pouvait-il « s’attendre » à quoi que ce soit ? Comment, ils s’attendaient à une perte de 0,003% ou quoi ? Et en quoi une perte de glace Groenlandaise de 0,007% est-elle un mauvaise nouvelle ? Hein ?

Un article de Willis Eschenbach pour Watts Up With That.

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