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Nouvelles de la France d’En Haut

lundi 31 mai 2010

Depuis le début des années 2000 et la saillie de Raffarin sur la France d’En-Bas et celle d’En-Haut, et bien que la définition de l’une et l’autre n’ait jamais été claire, jamais le décalage entre ces deux France n’aura été aussi flagrant. En effet, l’actualité nous rappelle hardiment que si la France d’En-Haut veut nous communiquer des choses, nous parler, son message est foncièrement différent de celui qui se gémit, tous les jours, dans la France d’En-Bas…

Et pour commencer, elle nous rassure tout de suite : la France d’En-Haut va bien.

D’ailleurs, elle va mieux que bien et ses petits doigts potelés se trémoussent gentiment de petits fours en petits fours, les amenant à sa bouche de cette précision de mouvement que seule des milliers de répétitions auront permis d’obtenir.

Car si le train de vie de la France d’En-Bas est arrêté en gare de Crise-En-Budget, avec décrochage de wagons et aiguillages coincés en direction de Dépressionville, celui de la France d’En-Haut continue de filer sur les rails de l’aisance joyeuse et insouciante vers Champagne-Et-Puth-Sur-Canapay.

La Cour des Comptes l’avait déjà noté, et le député Dosière, qui est un habitué de la traque des dépenses élyséennes, le redit haut et clair : oui, le Président de la République du Bisounoursland mène grand train. 114 millions d’euros pour le palais, c’est tout de même une jolie somme. On se rappellera que rien que la « communication » revint, en 2009, à 7.5 millions, dans lesquels sont probablement comptés les frais liés au changement du site internet institutionnel de la Maison Blan…heu ! je veux dire de la Maison Républicaine.

En un mot comme en cent : gaspillages.

Alors que les Français réalisent de plus en plus qu’ils ne pourront pas éviter des coupes franches et massives dans leurs propres budgets, réduire leurs dépenses et réviser nettement leurs prétentions dans les prochains mois et les prochaines années, les dépenses du gouvernement et de l’Elysée explosent, et empilent montants astronomiques sur réceptions somptuaires, communication coûteuse et gouffres financiers institutionnels.

Oh, je vois d’ici les remarques sur un poujadisme plus ou moins assumé : réclamer un gros coup viril de rabot sur ces dépenses ne va pas redonner un second souffle à une France financièrement exsangue. Mais tout comme pour certains dogmes – le salaire des ministres, par exemple – la force du symbole est ici d’une importance vitale pour la crédibilité du chef de l’état : si lui, ses lieutenants, ministres, chefs de cabinets et cohortes d’aides-de-camp multiples et dispendieux ne font pas cet effort qu’ils réclament aux autres, il y a fort à parier que personne ne suivra.

Et l’issue de ce comportement, on la connaît très bien : une faillite retentissante, au champagne et sous des feux d’artifices.

Mais tout porte à croire que si la France d’En-Bas doit déjà faire des efforts, la France d’En-Haut refuse d’en faire. Catégoriquement.

Cette France d’En-Haut est un chouilla différente de la France d’En-Haut des paragraphes précédents, mais elle est bel et bien en haut aussi : il s’agit de la clique bedonnante et bon-vivant des syndicats.

L’un des efforts proposés est, bien logiquement, que les retraites du public ne soient plus si éloignées des retraites du privé. Et sans même considérer les montants ou les bases de calculs (vastes questions déjà trop explosives), une proposition avait été faite au cours de ce mois de créer une véritable caisse de retraite pour la fonction publique.

Il s’avère en effet que les retraités de l’État n’ont pas de telle caisse : leurs pensions sont payées directement dans le budget courant de l’État, avec tout le souci que cela peut présenter en période de tensions budgétaires comme on les connaît actuellement.

Las. La proposition n’aura pas tenu bien longtemps. Pas plus que celle qui consistait à inclure les régimes spéciaux dans la réforme : la France d’En-Haut ne veut pas qu’on puisse imaginer une seule seconde toucher à ces privilèges.

Créer une caisse de retraite pour les pensionnés du public ? Vous n’y pensez pas ! Ce serait mettre le doigt dans l’engrenage d’une remise à plat comptable de cette partie monstrueuse du budget de l’État, et mettre ainsi en lumière le bordel cyclopéen qui, jusqu’à présent, a permis de tenir tranquille une part importante de l’électorat traditionnel des socialistes de droite et de gauche.

Les réformes seront donc exclusivement portées par le régime général, et les bidouilles et arrangements correspondant aux retraites du public pourront continuer à grouiller dans les sombres interlignes du budget de l’Etat, loin d’un minimum de lumière qu’une caisse séparée permettrait d’apporter.

Mais le mieux, dans tout ça, c’est lorsque cette même France d’En-Haut se fout ouvertement de la gueule de la France d’En-Bas, en toute parfaite méconnaissance de cette dernière. La France d’En-Haut ne connaît plus celle d’En-Bas ; elle ne la méprise pas, ce qui serait contre-productif, mais elle lui porte ce regard dégoulinant de commisération et de préjugés que certains idiots nantis peuvent avoir à l’encontre de débiles légers.

Typiquement, lorsqu’un certain Didier Le Reste, syndicacaliste et retraité cheminot, pleurniche à RTL sur sa retraite de 2300 euros net, on comprend qu’il mérite, comme certain autre privilégié élu républicain et ses 5000 euros pour un cadre moyen, de se faire redescendre dans la réalité avec quelques coups de latte bien ajustés dans un arrière-train devenu trop conséquent de ne l’avoir jamais beaucoup bougé des confortables fauteuils en cuir que les moutontribuables lui payèrent tout au long de sa brillante carrière de gréviste.

Pas de doute : la France d’En-Haut va bien, ne veut pas faire d’effort, et pète avec force odeurs dans la direction générale des citoyens qui raquent pour elle.

Nous sommes fin mai 2010. La dette est supérieure à 1500 milliards d’euros. Et ce sont toujours les mêmes qui payent et toujours les mêmes qui touchent.

Tout va bien. Ce pays est foutu.


Voir en ligne : Nouvelles de la France d

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