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Près du quartier, loin du coeur

mercredi 1er septembre 2010

Tu dois donner ton passeport ! lui ont-ils dit à l’arrivée à Caracas, pour éviter qu’il ne rejoigne la frontière et déserte. Toujours à l’aéroport ils lui ont lu le livret : « Tu ne peux pas dire que tu es cubain, tu ne dois pas aller dans les rues en tenue de médecin et il vaut mieux éviter les échanges avec des vénézuéliens ». Quelques jours plus tard il a compris que sa mission était politique car plus que porter remède aux problèmes cardiaques ou aux infections pulmonaires il devait examiner les consciences et vérifier les intentions de vote.

Au Venezuela il a aussi connu la corruption de ceux qui dirigent le projet « Au sein du Quartier ». Les « animateurs » d’ici convertis en « délinquants » là-bas, qui accaparent le pouvoir, les influences, l’argent et qui font même pression sur les médecins femmes et les infirmières qui voyagent seules pour qu’elles deviennent leurs maîtresses. Ils l’ont logé avec six collègues dans une chambre trop étroite et l’ont averti que s’ils venaient à mourir, victimes de la violence qu’il y a à l’extérieur, ils seraient donnés comme déserteurs. Mais il n’a pas déprimé. En fin de compte il n’a que 28 ans et c’est la première fois qu’il peut échapper à la protection paternelle, à la léthargie de son quartier et aux pénuries de l’hôpital ou il travaille.

Un mois après on arrivée on lui a donné une carte d’identité en l’avertissant qu’il pourrait l’utiliser pour voter aux prochaines élections. Dans une réunion éclair, quelqu’un a parlé du coup dur que serait pour Cuba la perte d’un allié aussi important en Amérique Latine. « Vous êtes des soldats de la patrie » leur a –t-on crié pour finir, et en tant que tels vous « devez garantir que la vague rouge s’impose dans les urnes ».

Le temps est maintenant passé où il croyait qu’il allait sauver des vies et alléger les douleurs. Il veut seulement rentrer, retourner sous la protection de sa famille, raconter à ses amis la vérité, mais pour le moment il ne le peut pas. Il doit d’abord faire la queue au collège électoral, laisser sa cotisation de soutien au PSUV, apposer son pouce sur un écran en signe d’assentiment. Il compte les jours qui restent jusqu’au dernier dimanche de septembre, et croit qu’ensuite ils le laisseront repartir.


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