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Epître aux féministes... et aux gays

mardi 15 avril 2003

Votre combat était légitime. Votre victoire est éclatante. Puissiez-vous ne pas la gâcher en faisant du féminisme la matrice involontaire du communautarisme ! Quel itinéraire en un siècle ! Depuis les révoltes conduites par des suffragettes peu nombreuses jusqu’au marteau-pilon législatif qui désormais traque, punit, excommunie le moindre soupçon de discrimination. [...]

Or vous n’avez plus besoin de voir le monde au seul prisme du féminisme. Dans les universités et les grandes écoles, où les jeunes filles monopolisent les mentions et les premières places aux dépens des garçons moins motivés, moins travailleurs et peut-être moins doués. Dans les entreprises, où arrivent des bataillons de jeunes diplômées qui ne mettent guère de temps à prendre l’ascendant sur leurs collègues masculins. Dans la politique elle-même, sans doute le dernier fort Chabrol de la masculinité, mais qui ne pourra ignorer éternellement les mouvements de la société. [...]

Au mot parité, déjà, les députés se mettent au garde-à-vous. Au mot femme, ils tremblent. Votre pouvoir est absolu : les parlementaires cherchent à devancer vos désirs, comme les courtisans ceux d’un Louis XIV ou d’un Napoléon. Ainsi les vit-on, dans le même esprit, et au nom des meilleurs sentiments, renforcer en 1998 les sanctions pénales en cas de harcèlement sexuel et glisser dans ce fourre-tout démagogique que fut la loi de modernisation sociale un dispositif exhaustif à propos du harcèlement moral, dont chacun devinait qu’il visait d’abord la protection des femmes au travail. [...]

Certains d’entre nous rêvent d’être les compagnons de route du féminisme, comme certains bourgeois se plaisaient à l’être du communisme. D’autres se veulent « chiens de garde » afin de recevoir un certificat de bonne conduite de la part des Chiennes de garde. D’autres enfin, sans doute les plus nombreux, se méfient de ce militantisme-là, autant que de toute autre action collective : ils se contentent de se soumettre aux exigences de l’époque, de respecter le nouvel ordre social et de se placer dans le sens du vent.

Vous ne pouvez pas d’une main revendiquer un droit à l’indifférence poussé jusqu’à l’extrême, c’est-à-dire le droit au mariage, à l’adoption, à la procréation médicale assistée, et de l’autre réclamer un droit à la différence, lui aussi absolu, en exigeant la reconnaissance quasi institutionnelle de pratiques communautaires, assortie de comportements de pouvoir dignes d’une confrérie franc-maçonne.

[...]

Quel était, au fond, le rêve commun, à des nuances près, d’un Bory, d’un Hocquenghem, d’un Foucault ? Une société régie par le droit à l’indifférence, dans laquelle les homosexuels se sentiraient naturellement à l’aise, et qui verrait s’étioler, au fil du temps, les spécificités culturelles derrière lesquelles il leur avait fallu se protéger.

Entendraient-ils un Christophe Girard réclamer des sections « gays » dans les bibliothèques, ils crieraient : « Au fou ! ».

[...]

Vous êtes une maçonnerie comme une autre, à l’instar des « corpsards des mines », des inspecteurs des finances ou des francs-maçons eux-mêmes. Est-ce un procès en sorcellerie ? Autant que pour les autres confréries ; ni plus ni moins. Le sentiment d’exclusion conduit à des réflexes de solidarité et ceux-ci engendrent tout naturellement des réseaux de pouvoir. Cette vieille loi sociologique vaut pour vous comme pour les autres. Vous avez vos codes de reconnaissance, vos gestes de connivence, à l’instar du « gratouillis » des poignées de main franc-maçonnes ou de la recherche des patronymes juifs : rien n’est plus banal.

Certains observateurs des systèmes de pouvoir vont même jusqu’à prétendre que votre lobby est désormais le plus puissant.

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