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Droit au logement : malfaisance démagogique

dimanche 22 avril 2007

La détresse des sans-logis est réelle, mais la compassion et l’affichage de bonnes intentions ne suffisent pas à rendre acceptable n’importe quelle proposition visant à en finir avec le mal-logement. Sans présumer des termes exact du texte qui sera soumis au parlement, le principe même du « droit au logement » opposable à la puissance publique est une grave faute économique et politique, qui donnera bonne conscience à ses promoteurs, leur apportera peut être quelques voix lors des prochaines échéances, mais ne fera qu’aggraver la crise du logement à long terme.

Un tel droit revient à affirmer que toute personne doit occuper un logement quand bien même elle serait en incapacité, réelle ou affichée, d’en payer le prix de marché. Pour que ce droit au logement ait une quelconque apparence d’effectivité, le législateur devra fixer arbitrairement le prix du logement à des niveaux très bas, voire en assurer une gratuité apparente à l’occupant, transférant la charge du financement du logement soit sur les propriétaires, soit sur les contribuables.

Si l’application du droit au logement était imposée au secteur locatif privé, cela promettrait le retour de lois similaires à celles de l’entre deux guerres qui, en encadrant fortement les loyers et les baux locatifs, avaient provoqué une pénurie sans précédent d’habitations avant la seconde guerre mondiale, faute d’investisseurs assez fous pour louer à de telles conditions. Le secteur privé fuirait plus encore qu’aujourd’hui l’immobilier locatif.

Toute tentative de faire appliquer le droit au logement ne peut donc reposer que sur la construction massive d’habitations par la puissance publique. Or, le logement public, nous connaissons. Depuis l’hiver 1954, où déjà la démagogie compassionnelle avait conduit l’état à investir en grande partie ce secteur, le pays a déversé sans compter des tombereaux d’argent public sur le logement sans que jamais les problèmes observés ne soient réellement résolus. En effet, le logement public, en s’affichant à un prix inférieur à celui résultant de la confrontation de l’offre et de la demande sur un marché libre, engendre mécaniquement une demande supérieure à l’offre : tout système d’offre de logements subventionnés génère sa propre pénurie.

Plus grave, le « droit au logement » obligera les communes à fournir un toit, décent de préférence, à toute personne mal logée, selon des critères qui restent à définir. Par conséquent, les personnes en « limite » des conditions permettant d’accéder à ce droit n’auront aucun intérêt à rechercher un logement dans le secteur privé qui tendra donc à se spécialiser sur l’offre de gamme supérieure : l’application stricte du droit au logement aggravera encore la situation des classes moyennes, trop aisées pour prétendre au parc social, trop pauvres pour supporter les loyers du privé et apporter les garanties nécessaires aux bailleurs rendus prudents par des lois qui les désavantagent face aux locataires en cas de litige. Ces ménages, au nom du droit au logement, se retourneront donc vers la puissance publique, qui devra encore accroître la pression fiscale pour respecter son obligation légale de logement pour tous, et ainsi de suite.

La seule variable d’ajustement permettant au bâtisseur public de limiter cet excès de demande consisterait à diminuer la qualité des logements offerts, seul moyen de limiter à la fois le coût d’investissement induit par le droit au logement, et le nombre de ménages souhaitant en bénéficier. Ce droit deviendrait de fait un droit à de mauvais logements où s’entasseraient les familles modestes. Quel progrès par rapport aux cités HLM des années 60 !

Devant cette inextricable cercle vicieux, il est possible qu’à nouveau le législateur vienne au secours des collectivités étranglées financièrement, vidant par quelque acrobatie le droit au logement de sa substance.

La liberté comme remède à la crise

La crise actuelle résulte d’une augmentation du prix du logement supérieure de 70% à celle des revenus entre 1995 et 2005. Trop souvent, la hausse de la demande liée à la chute du coût du crédit et à l’augmentation du nombre de ménages est citée comme seule cause de cette flambée, et le traitement social est invoqué comme seul remède possible à une pénurie estimée selon diverses sources entre 700.000 et 1.500.000 habitations.

Or, il existe des marchés où les mêmes conditions macro-économiques n’ont provoqué ni pénurie ni envolée des prix. Bruxelles, où l’immobilier reste bon marché malgré la forte demande induite par l’expansion des institutions européennes, nous montre que la liberté du loyer et la moindre protection législative du locataire n’ont pas d’effet néfaste sur le logement des plus pauvres, car l’investissement locatif ne s’y trouve de fait pas découragé. La plupart des grandes cités de la middle America telles que Houston, malgré une croissance économique et démographique soutenue, ne connaissent pas la bulle immobilière qui affecte leurs soeurs des côtes est et ouest, car elles ont eu l’intelligence de ne jamais poser trop d’entraves à la construction, que ce soit au niveau de l’urbanisme ou de la réglementation de la location. Dans ces villes, les poches de grande pauvreté sont rares, et les familles modestes trouvent aisément des maisons de taille respectable pour des loyers accessibles, sans intervention publique. Ce n’est pas un hasard de nombreuses victimes de l’ouragan Katrina ont choisi Houston comme point de chute pour tenter de se reconstruire un toit et une vie.

En France, le verrouillage de la construction par des règles d’urbanisme malthusiennes et l’encadrement des baux locatifs par la loi condamnent le marché du logement à la pénurie. Le traitement social et législatif du malaise actuel est voué à l’échec. Seule une politique du logement résolument libérale permettra de sortir durablement de cent années de crise du logement encadré par l’état.

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