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Critique de Not Evil Just Wrong

lundi 22 février 2010

Le documentaire Not Evil Just Wrong, vu par 400 000 personnes lors de sa première le 18 octobre 2009, se veut une réponse au film d’Al Gore, Une vérité qui dérange. Il aspire en particulier à montrer le coût de « l’hystérie du réchauffement climatique ». Afin de prolonger la réflexion de Vincent Bénard, nous vous proposons dans ces Mélanges une revue inédite du documentaire. Nous remercions Liberté Chérie, qui a été à l’origine d’une retransmission à Paris en octobre du documentaire,

Tout d’abord, la liste des intervenants du documentaire mélangent tant scientifiques sceptiques (ou non) bien connus qu’acteurs de la société civile, en Afrique ou aux États-Unis (Richard Lindzen, Patrick Moore, Stephen McIntyre, James Hansen, etc.). Le but du documentaire n’est en effet pas de se focaliser sur la question scientifique, à la différence de The Great Global Warming Swindle diffusé sur Channel 4 au Royaume-Uni. Un choix qui se comprend : la question du réchauffement climatique n’est pas de connaître sa réalité et de le contrecarrer à tout coup, mais bien plus complexe :
- Quelle est son ampleur, actuelle, passée et future ? Le climat a fortement varié dans le passé, est-ce exceptionnel aujourd’hui ?
- Quelles en sont les causes, naturelles, humaines ou, plus probablement, les deux ?
- Quelles en seraient les conséquences ?
- Quel est le coût des mesures envisagées pour lutter contre ?
Par conséquent, un débat économique et politique est pertinent.
Quelque soit la réalité du réchauffement climatique, toute mesure n’est pas bonne à prendre pour le contrecarrer.

Remarque qui souligne une des limites du « scepticisme » du réchauffement climatique, quand il prend la forme d’un refus d’envisager la possibilité même d’un réchauffement. Procéder ainsi, ce serait laisser le terrain des réponses à y apporter aux partisans de l’étatisme, alors que les économistes ont beaucoup à apporter pour éclairer la question des meilleures réponses à un potentiel changement climatique.

Dans Not Evil Just Wrong on appréciera également la volonté affichée par les réalisateurs (Phelim McAleer et Ann McElhinney) de révoquer l’idée que les tenants de la théorie de l’origine humaine du réchauffement climatique font partie d’un complot, visant par exemple à imposer un gouvernement mondial ou à détruire l’économie de marché. Certes, les engagements radicaux de certains militants du « réchauffisme » (anticapitalisme d’Hervé Kempf, remise en cause de la démocratie par James Hansen, appels au gouvernement mondial d’autres, etc.) pourraient sembler confirmer des motivations politiques derrière la défense de l’origine anthropique du réchauffement climatique. Mais des exemples ponctuels ne prouvent en rien une accusation que, de toute façon, personne ne porte. Pour autant, elle est régulièrement proférée par ceux qui, comme Stéphane Foucart, Sylvestre Huet ou Hervé Kempf, ont bien compris combien cette invocation du complot décrédibilisait ceux à qui elle était prêtée. Le titre du documentaire, Not Evil Just Wrong, répond à cette critique avant même qu’elle ait pu être proférée. Ce ne sont pas des motivations machiavéliques (Evil) qui poussent les écologistes à demander des actions « contre le réchauffement climatique » qui risqueraient de détruire l’économie, ce sont des erreurs (Wrong). Erreurs d’appréciations sur les conséquences des mesures qu’ils préconisent en particulier.

Le documentaire est enfin une dénonciation des excès de médias à la recherche du sensationnalisme pour faire la une. Les médias fournissent une prime aux mieux disant en terme de nombre de victimes potentielles : plus on annonce de morts, de catastrophes, plus on a de chances de faire la une rappelle les réalisateurs, avec l’exemple de la vache folle : des 500 000 morts promis par certains, on arriva finalement à … 200 morts. La grippe A, H1N1 ou porcine selon le nom que l’on retienne aura vécu exactement le même sort. Comme d’aucuns l’écrivirent, on est passé du principe de précaution au principe de la démesure. Le réchauffement climatique a connu le même biais et l’alarmisme a été clairement utilisé pour se faire entendre, même quand il n’avait strictement aucune raison d’être, les glaciers de l’Himalaya dont la disparition était annoncée pour 2035 peuvent en témoigner

Cependant, à ces points positifs correspondent aussi des aspects moins convaincants du film. Je reste ainsi pour ma part très sceptique devant la tentative de copier Michael Moore en peignant avec force sentiments la vie d’un ouvrier américain ou d’un africain ordinaire. Tant Al Gore que Michael Moore ou d’autres s’exonèrent du travail de conviction en ayant recours aux sentiments. Certains jugeront que c’est nécessaire pour toucher un large public ou faire passer des idées peu accessibles. Peut-être, mais je ne les rejoindrai pas sur ce point. Que nos opposants choisissent des méthodes critiquables ne doit pas nous pousser à les adopter nous aussi. Il est certes nécessaire de ne pas limiter le débat sur le réchauffement climatique à un débat scientifique, on l’a dit plus haut, mais cela ne doit pas se faire à n’importe quel coût. Enfin, on ne peut pas occulter certains défauts qui sont la résultante du manque de moyens du documentaire. Ainsi, les sous-titres ne traduisent pas convenablement le terme aussi courant d’IPCC (GIEC en français) mais vont inventer un nouvel acronyme qui laisse planer un doute inutile sur la qualité de l’ensemble.


Image : affiche du documentaire, tous droits r

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